Au cours de la conférence, Pierre Vermeren nous a présenté les thèses qu’il a développées dans son ouvrage « L’impasse de la métropolisation ».
Il a notamment expliqué l’origine de ce phénomène apparu aux États-Unis dans les années 60 avec la concentration urbaine de cadres, de nouveaux types d’activités tertiaires tout en repoussant à l’extérieur des villes les activités industrielles et agricoles. Ce modèle des villes comme Paris ou Lyon l’ont progressivement adopté.
Pour l’auteur, ce modèle génère des crises, des fractures entre les métropoles et la périphérie qui peuvent expliquer le phénomène des gilets jaunes. Ces métropoles forment un réseau, elles sont très bien connectées entre elles, en train, en avion. Les grandes villes qui avaient une population majoritairement ouvrière, ont vu cette population partir et être remplacée progressivement par des populations plus aisées, des cadres, des ingénieurs. Ce phénomène a entraîné une augmentation du prix de l’immobilier, un changement des activités économiques dans les villes dont le mode de vie s’éloigne de plus en plus de celui des territoires périphériques et ruraux.
Pour lui, ce phénomène conduit à plusieurs impasses :
- La métropolisation est créatrice de déséquilibre. Les métropoles concentrent les activités intellectuelles, universitaires, économiques les plus porteuses. Elle a créé des milieux urbains homogènes dont les personnes ont un niveau de vie similaire, excluant les classes moyennes et populaires dans d’autres villes en périphérie, dans des villes moyennes, dans des territoires ruraux.
- La métropolisation est une impasse énergétique et environnementale. La ville dissocie la production et la consommation. La production est faite ailleurs, que ce soit l’agriculture ou l’industrie. De fait, les villes dépendent des transports, qui sont polluants, pour amener les produits dans les cœurs de ville.
- Elle a éloigné des classes populaires des villes qui font les trajets quotidiens. Des professionnels comme les infirmières, par exemple, avec leur salaire, n’ont pas les moyens de vivre dans les cœurs des métropoles où elles travaillent. Elle crée des zones où il y a beaucoup d’emplois et d’autres exclus du développement plus économique.
L’Allemagne a connu par exemple un autre modèle. Elle a mieux réparti les industries, a mieux protégé son agriculture et ne connaît pas le même phénomène de métropolisation. Pour P. Vermeren, l’Etat doit agir via les grands services publics, il doit mieux répartir les grands CHU, les universités, les services publics sur le territoire pour freiner le phénomène de métropolisation et développer des territoires qui en ont besoin. De même, il peut attirer des industries vers ces mêmes territoires, notamment des industries innovantes pour réduire cette fracture. L’Etat peut utiliser son réseau de préfectures, de sous-préfectures pour réorienter des nouveaux services publics dans des territoires en difficultés. Les régions ont aussi leur rôle à jouer.
Les grandes villes doivent cesser de cacher, de repousser toutes les activités qui dérangent, les industries ou en tout cas assumer ce phénomène et aider davantage les territoires qui reçoivent ces activités, davantage les connecter aux métropoles pour retrouver du lien et éviter les fractures qui existent entre les métropoles et les autres territoires.
Si le phénomène de métropolisation vous intéresse, nous vous invitons à lire le livre de Pierre Vermeren.
Vous pouvez écouter les interviews de l’historien dans les différents médias comme ici à Europe 1.